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19 janvier 2011

Sept conseils pour motiver en période incertaine

Les conseils de Philippe Korda, fondateur de Korda & Partners, cabinet conseil et formation basé à Londres et Paris.

En période difficile, il est plus dur d'obtenir l'engagement des salariés : le moral est plus bas, les budgets sont plus contraints et le management a souvent d'autres priorités. Il est néanmoins crucial d'obtenir cette implication : il existe un lien direct entre la performance de l'entreprise et l'engagement des salariés. Quand les gens sont motivés, l'entreprise en retire des bénéfices : elle maîtrise son turnover, elle améliore sa productivité et augmente sa satisfaction client. Mais l'engagement des salariés recule presque partout dans le monde. En France, on estime qu'un salarié sur quatre est totalement désengagé. Ce désinvestissement atteint désormais les cadres. Il est pourtant possible de maintenir et de développer l'implication des troupes en période incertaine. Et ce n'est pas juste une question de rémunération. Rappelez-vous : si les gens sous-payés sont souvent sous-motivés, les gens surpayés ne sont jamais surmotivés !

1 Écouter plus que jamais

Ecouter vraiment vos collaborateurs devient une priorité : plus on écoute les gens, plus les réponses aux attentes seront précises et chirurgicales, ciblées et efficaces. Ecouter, c'est interroger mais pas seulement : si on en reste à questionner les salariés sur ce qu'ils réclament, on obtient souvent des réponses du type "on veut plus de moyens...". Il faut leur demander aussi : "Que proposez-vous ?" Je suggère de poser trois questions à vos collaborateurs : "Qu'est-ce que la direction peut vous apporter ?", "Qu'est-ce que votre manager pourrait vous apporter ?", et enfin "Vous et vos collègues, que pourriez-vous apporter ?" Les collaborateurs ont généralement beaucoup d'idées et de propositions de solutions.

2 Reformuler la vision de l'entreprise

Plus les valeurs et la vision de l'entreprise sont claires et partagées, moins on a besoin d'encadrer les salariés avec des règles et des procédures. La vision est un outil très puissant. Mais attention, elle ne peut se résumer à la vision business. Quand Orange France Télécom annonce comme vision "rester leader dans le mobile et devenir plus profitable", la vision est certes porteuse de sens mais pas pour tous les collaborateurs. Comment le salarié d'un call center peut-il s'y reconnaître et donner du sens à son travail ? Vous devez formuler l'ambition de votre entreprise en des termes qui procurent de la fierté aux gens, donnent du sens à leur activité. Formulez - ou reformulez - une vision de l'entreprise qui soit humaine et pas seulement financière. Prenez exemple sur Danone qui a reformulé sa vision avec une double dimension économique et sociale : "Contribuer à la santé du plus grand nombre par l'alimentation." Chaque collaborateur de Danone peut se l'approprier. Autre bonne pratique dont vous pouvez vous inspirer, celle de Southwest Airlines, une compagnie aérienne low-cost, connue pour son excellente productivité et l'engagement sans équivalent de ses collaborateurs. Elle est la seule compagnie américaine à n'avoir pas licencié après le 11-Septembre. Son ambition : donner l'opportunité de voyager à des gens qui n'en auraient pas les moyens (grands-parents modestes souhaitant aller voir leurs petits-enfants, maman qui emmène son fils à un grand match de base-ball...). Tous les salariés peuvent se pénétrer de cet idéal et se décarcasser pour le réaliser.

3 Mesurer et comparer les progrès

Piloter l'entreprise en comparant les progrès réalisés permet d'être plus ambitieux dans les projets que lorsqu'on manage par les objectifs et les budgets, une pratique qui encourage plutôt la prudence. En ce qui concerne les progrès humains, mesurez l'engagement des salariés au niveau le plus élémentaire de votre organisation (service, centre de profit...). Vous devez comparer non les résultats en valeur absolue mais les avancées réalisés. Les études de Gallup l'ont démontré : il existe une corrélation étroite entre les performances d'une unité opérationnelle (rentabilité, satisfaction client...) et le taux de réponses positives à la question "Au cours de la semaine dernière, quelqu'un vous a-t-il félicité pour la qualité de votre travail ?". Pour solliciter l'engagement des collaborateurs, vous devez donc en rendre responsables leurs managers. Intégrez cet élément dans leur évaluation au même titre que la satisfaction client ou les résultats économiques. En 2010, neuf entreprises du CAC 40 sur dix ont ainsi inclus des critères sociaux dans la rémunération variable de leurs cadres dirigeants.

4 Diffuser ce qui marche

Repérez les managers dont les équipes ont fait le plus de progrès. Comment font-ils pour avoir les équipes les plus performantes et les plus motivées ? Il est toujours difficile d'accepter les recettes de l'extérieur. Si elles viennent d'un autre département de l'entreprise, cela passe mieux. Il vous faut identifier les meilleures pratiques de management dans votre organisation et sélectionner celles qui sont généralisables à coût nul. Enfin, exposez à vos managers ces pratiques pour leur donner l'opportunité de prendre de nouvelles initiatives. N'imposez rien : préférez plutôt réaliser un catalogue de bonnes pratiques et diffusez-le auprès des autres managers pour qu'ils s'en inspirent dans leur propre périmètre. A eux de choisir celles des bonnes pratiques qui peuvent s'appliquer dans leur service ou leur domaine.

5 Faire des choses simples et visibles

Disneyland Paris a vu baisser l'absentéisme chez ses collaborateurs simplement en repeignant des vestiaires défraîchis. C'était un geste de respect envers eux, une marque de reconnaissance. Il faut mener des actions de fond mais avoir aussi des gestes symboliques, visibles, qui ont le mérite de coûter très peu. Souvent, les responsables des ressources humaines prennent des décisions qui n'ont pas d'impact visible par l'ouvrier dans son atelier. Des actions type "coup de peinture" peuvent avoir beaucoup plus d'effet qu'on l'imagine sur le quotidien et la motivation des gens. Des actions de cohésion de groupe peuvent aussi être lancées. Nous suggérons par exemple d'inviter une personne de l'opérationnel à devenir "membre d'un jour" du comité de direction pour donner son avis de personne de terrain. Le bouche-à-oreille qu'il fera auprès des collègues permettra de dégonfler bien des mythes et des fantasmes ! Orange a mené ce type d'opération "comité de direction d'un jour" avec des téléconseillers de centres d'appels. Autre piste à explorer, organiser une journée des talents : repérez les salariés qui ont un talent caché (peinture, théâtre, musique...) et invitez-les un jour dans l'entreprise à le dévoiler au reste des collaborateurs. Cela a toujours beaucoup d'impact positif en interne.

6 Favoriser un climat chaleureux

Jeter de la poudre aux yeux ne suffit pas. Ne croyez pas qu'une sortie au bowling avec vos collaborateurs suffira à les remotiver ! Si les relations entre équipes sont trop dégradées, peut-être faut-il revoir le système de rémunération ou les comportements managériaux. Ou alors est-ce la stratégie qui n'est pas évidente ? Ou encore les tâches à accomplir ont-elles été vidées de leur substance ? Il est important, pour maintenir ou développer l'engagement des collaborateurs, de favoriser un climat chaleureux et bienveillant. Les études de Gallup menées depuis des années dans le monde entier démontrent que les collaborateurs qui déclarent "avoir un meilleur ami au travail" sont 50 % plus nombreux que les autres à être satisfaits de leur travail. Surtout, ils sont sept fois plus nombreux à se déclarer "totalement engagés dans leur vie professionnelle". Conclusion : un moyen de renforcer le lien affectif entre les collaborateurs et l'entreprise est de renforcer le lien affectif entre les collaborateurs eux-mêmes !

7 Informer pour enthousiasmer

Mieux vaut faire d'abord et communiquer après. Sauf auprès de l'encadrement supérieur qu'il faut impliquer en amont. A ce stade, communiquez de façon audacieuse, surprenante, émouvante : adressez-vous au coeur, le personnel doit se sentir concerné. Un des problèmes fréquents de la communication interne est que le langage y est très souvent abstrait. La communication doit être chaude, émotionnelle. Au lieu de présenter les avantages et inconvénients de l'entreprise sur des slides avec des "bullet points", il peut être plus marquant de faire une communication en organisant... un procès de l'entreprise ! Un procureur et un avocat se disputent l'accusation et la défense de l'entreprise. Faites rire et applaudir : vous créerez une communication plus émotionnelle qui marquera plus les esprits qu'une série de slides vite oubliés.


Par: Etienne Gless


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